AccueilAccueil  tumblr  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  MembresMembres  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
FORUM FERME
-45%
Le deal à ne pas rater :
WHIRLPOOL OWFC3C26X – Lave-vaisselle pose libre 14 couverts – ...
339 € 622 €
Voir le deal

Partagez
 

 Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond

écrivainpoème d'hiver
Zachariah Loganach
Zachariah Loganach
épargné(e)
avatar // crédit(s) : Axel Auriant // slytherimpala ~ solosands
âge : 23 ans
statut marital : plus célib' tu meurs

Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Black-aesthetic-gif-8



métier : loser professionnel
carcasse : Mortel, si désespérément mortel, fragile à tous les instants, soumis à la vacuité du cycle de la vie : on nait, les années passent, puis on meurt. Chouette existence que celle d’un humain, franchement.
damnation : Aux sombres héros de l'a(mer) // vivre sur une île et avoir le mal de mer ? Ouais, incroyable mais vrai. Quand il était petit, son père a essayé de l'emmener sur son bateau de pêche pour qu'il devienne un homme, un vrai, et cette sortie n'a été que la confirmation du désespoir de William Loganach vis-à-vis de son fils. Zachariah est issu d'une longue lignée de marins et de chasseurs de baleine, il est censé avoir le pied marin, et pourtant... Rien à faire. S'il met un pied sur un navire, la nausée le saisit immédiatement, suivi de vomissements atroces s'il persiste à vouloir rester sur les flots.

échanges : 242
arrivée : 21/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Mer 15 Avr - 23:36

date du rp ≈ 02 février 1966
lieu du rp ≈ Ecole


Souviens-toi de l'automne

Hector & Zach ☆ Chaque soir de mon enfance, je rentrais à la maison poursuivi par l’école. Mes carnets disaient la réprobation de mes maîtres. Quand je n’étais pas le dernier de ma classe, c’est que j’en étais l’avant-dernier.
☾ ⋆  ☾ ⋆ ☾ ☼ ☽ ⋆ ☽ ⋆ ☽

Le petit garçon est assis en tailleur, à même le sol. Il est seul, dans la petite salle de classe : ses camarades sont, depuis plusieurs minutes déjà, sortis dans la cour de récréation pour jouer aux billes et à chat, mais lui n’a pas gagné ce privilège. C’est le seul de son niveau, après tout, qui n’a pas eu la moyenne à la dictée, et il est bien normal qu’il soit privé de sortie – il doit recopier, encore et encore, les mots qu’il n’a pas orthographié correctement, en réalité, pratiquement l’entièreté du texte. La plupart de ses phrases étaient d’ailleurs incomplètes, car il n’allait pas assez vite pour suivre le débit de parole du maître. Il ne pouvait pas réfléchir à la façon dont les mots s’épelaient qu’il fallait déjà écrire la suite de l’histoire, un conte moralisateur sur un loup se faisant passer pour un agneau, d’un auteur français ; au bout d’un moment, il a fini par jeter l’éponge et a abandonné tout espoir de finir la dictée. Bien mal lui en pris, puisque le voilà maintenant ostracisé, solitaire ou presque dans cette salle austère (il y a bien sûr le professeur qui le surveille d’un œil distrait), à regarder par la fenêtre, du coin de l’œil, les autres enfants de son âge chasser un cerceau avec un bâton – et il sait que son père ne manquera pas, le soir venu, de le corriger pour ses inaptitudes. Son dos est déjà couvert de bleus et de contusions plus ou moins fraîches, cachées, bien sûr, par son uniforme scolaire aux couleurs passées dues à de trop nombreux lavages, ses parents n’ayant pas les moyens de lui en acheter plusieurs exemplaires identiques : sa mère se contente donc de le nettoyer à l’eau claire à chaque fin de semaine pour éviter que les odeurs ne s’installent de manière permanente, et c’est très bien comme ça.

Le maître s’éclaircit la gorge, se rapproche de Zachariah qui peine à tracer les lettres sur son cahier. Son écriture est catastrophique, et la feuille est tachée d’encre noire à cause de sa plume qui fuit – c’est un désastre. Il soupire.

« - Bon, va dehors, ça ne sert à rien. Je mettrais un mot pour tes parents sur ton carnet de liaison. »

Zach hoche la tête sans un bruit. Ça ne servirait à rien de protester, ce fait indéniable, il l’a appris depuis qu’il est entré à l’école il y a quelques mois : on lui a suffisamment dit qu’il était idiot et qu’il ne comprenait rien à rien, donc, il engrange sa colère à l’intérieur de son petit corps et attend d’être dehors, sur les plages de Selkirk, pour laisser exploser sa hargne sans que personne ne vienne le rabrouer. Même Elspeth, sa seule amie à l’école, ne le comprend pas. Elle, elle n’a pas de soucis particuliers avec les lettres, et si elle essaie de l’aider du mieux qu’elle peut, ses efforts sont vains. Il a peut-être raison, le maître. Il est peut-être un simplet, et il faut qu’il l’admette, mais c’est difficile, du haut de ses 6 ans, de penser qu’on est un abruti fini. Alors, il se tait, alors, il baisse la tête.

Dehors, les élèves de l’école de Selkirk sont tous plus ou moins divisés par âge : s’ils ne sont pas assez pour avoir des niveaux séparés, les grands ne s’embarrassent pas des petits durant les temps de pause, et se réunissent entre eux sans se préoccuper de leurs cadets. Tous les enfants de son âge semblent entourer une seule et même personne, un petit garçon aux cheveux sombres et aux vêtements de bien meilleure qualité que les siens. Hector Desmond. Tout lui réussit, à lui, il est ami avec tout le monde, c’est l’un des meilleurs de la classe ; il est Soleil lorsque Zach ne peut même pas prétendre être la Lune, seulement une étoile qui peine à briller. Fourrant les mains dans ses poches, le jeune Loganach s’approche d’un arbre et s’y adosse, faisant mine de s’amuser avec un bâton tout en regardant, au loin, le petit attroupement. Qu’est-ce qu’ils peuvent bien tous lui trouver, à Hector ? Et surtout… qu’est-ce qu’il lui manque pour qu’il soit comme lui ? Il a envie de pleurer, mais il se retient. Son père lui dit d’être un homme à tout bout de champ, et les hommes, ça ne pleure pas : sa petite sœur Mary, elle, elle a de la chance, elle peut laisser couler ses larmes autant qu’elle le veut et on ne lui dit jamais rien.

Du haut de ses 6 ans, il a déjà compris que le monde ne lui ferait aucun cadeau, Zachariah Loganach. Alors, il se contente de donner un coup de pied dans un caillou en regardant d’un œil mauvais Hector Desmond, le maudissant, le vouant aux gémonies, le nommant responsable de tous ses maux - comme la personnification du mauvais diable qui l’a fait naître dans la mauvaise famille, sur la mauvaise île. Puisqu’il n’a personne d’autre à blâmer, ça sera lui.

Codage par Magma.
Revenir en haut Aller en bas
https://abime.forumactif.com/t431-zachariah-what-s-up-danger#5292 https://abime.forumactif.com/t439-the-party-the-after-party
Hector Desmond
Hector Desmond
épargné(e)
avatar // crédit(s) : charlie heaton // flow (la meilleure)
âge : 23 ans
"On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,
On monte. Quelle est donc cette aube ? C’est la tombe."

métier : poète en herbe
carcasse : mortel
échanges : 49
arrivée : 22/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Dim 19 Avr - 19:46

date du rp ≈ 2 février 1966
lieu du rp ≈ école

souviens-toi de l'automne


Hector — Zach

fais-moi une place au fond d'ta bulle, et si j't'agace, si j'suis trop nul, je deviendrais tout pâle, tout muet, tout p'tit, pour qu'tu m'oublies



Hector est un crépuscule – un être aux couleurs vives, avec dans les yeux l'éclat des pires folies picturales, des caprices de peintres entichés de teintes impossibles ; est plus crépusculaire encore son évanescence, la fugacité de cette splendeur aveuglante. Comme le couchant, Hector est voué à s'engoncer dans les ténèbres, à laisser place à la nuit la plus profonde – délavées, ainsi, les folles bigarrures, les pâles dorures, les rouges brasillants ! La beauté du papillon tient à sa fragilité – peut-être qu'il en va de même pour Hector, qu'il ne peut scintiller que parce qu'il se déchire une fois la nuit tombée, que son cœur n'a de pureté sans son pendant sanglant ; peut-être qu'il est voué à être bicéphale, le poète, au mépris de sa santé psychique, au mépris de son cœur malmené ; peut-être aussi qu'il va mourir jeune, l'enfant parfait au sourire trop grand ; peut-être qu'il va mourir seul, lui qui attire les masses, lui l'aimant social. Sera-t-il un Icare de plus, carbonisé au brasier de son orgueil, consumé au bûcher de sa comédie quotidienne ? Ou un Grenouille maudit, que dévorent les autres pour capter l'essence exquise de son irrésistible aménité ? Il aimerait le croire, Hector, aimerait à se figurer réincarnation, figure mythologique élue par la métempsychose, ou bien avatar romanesque passé à la postérité – mais il porte le nom d'un perdant, le nom d'un mort à la guerre, le nom consumé et noirci de l'un des plus célèbres vaincus de la mythologie ; sa renommée est de cendres, sa renommée est de sang et d'opprobre. Est-il possible que le terrible sous-texte de ce prénom ait entaché la destinée du futur poète, assombri un avenir encore sans ombrage ?

Le petit être qui griffonne pendant la récréation des mots encore malhabiles sur un carnet clair n'a pas conscience encore du déchirement que sera son existence terne et illusoire, des taches qui viendront éclabousser les années, toujours un peu plus à chaque passage. Il n'a pas non plus véritablement conscience de cet instinct de dissimulation qui est le sien – sa comédie humaine, son masque social ont quelque chose de viscéral, de l'ordre du primaire, de l'auto-préservation ; il feint pour vivre parmi les autres, et il vit parmi les autres car il feint. Hector aura, bien des années après, l’œil affûté par la littérature, aiguisé par les trop nombreux portraits romanesques, par les esquisses poétiques – mais Hector, l'enfant, sait déjà, certes de manière plus ou moins vague, ce sur quoi se posent les yeux, ce que retient l'imagination, ce qui forme les impressions  et ce qui forge l'opinion. A six ans, il sait comment orienter un sourire pour qu'il le lui soit rendu, à quel point un rire se doit d'être flûté pour paraître naturel, à partir de combien de secondes un regard se fait intrusif. Ce n'est pas tant de la manipulation sciemment opérée qu'un instinct de socialisation tapi tout au fond de lui, qui lui crie de s'adapter, de se façonner tout contre les autres, dans l'étroitesse d'une proximité salvatrice. Il ne sent pas encore s'agiter en lui les tentacules de l'affliction, ni se refermer les mâchoires sombres de ce mal des viscères, de l'âme et du cœur qui lui trouera les chairs. Il n'est qu'un enfant un peu trop attentif, qui sait se faire apprécier, et faire reculer ce qui crie en lui. Un enfant, qui, déjà, rassemble autour de lui sans démesure aucune, sans jamais s'avilir de flagorneries – c'est sa pureté qui attire, ce sourire qui est si savamment calculé qu'on ne saurait le trouver que vrai, ce qui s'allume au fond de ses yeux quand il vous offre un rire, la main tendue qu'on entend dans sa voix lorsqu'il vous écoute vous délester de vos tourments ou lui conter une anecdote.

Rien n'échappe à son observation déjà particulièrement fine, et certainement pas lui, ce garçon qui s'assombrit lorsque se croisent leurs regards, qui marche tête baissée et poings fermés. Ce garçon à ses antipodes, ce garçon à l'aura agitée de haine difficilement contenue. Alors qu'il associe aux autres, à ceux qui se massent à ses côtés, les mêmes teintes ordinaires, ce garçon-là a toujours eu des bleus bondissants, mouchetés d'un argent un peu noirci, du froid métal d'une colère sourde. En Hector, poète en germination, est montée une fascination irrépressible, qu'il a laissée bourgeonner dans le secret de ses pensées les plus profondes. Ses analyses, précoces, pertinentes,  lui ont alors soufflé la prudence, l'éloignement – la singularité de ce garçon-là appelait à une attitude fondamentalement différente de celle qui suffisait en temps ordinaire à séduire les autres. Alors, il s'y est tenu – pas un pas vers lui, et l’œil n'a jamais traîné sur le visage une seconde de trop, du moins pas lorsqu'il était au centre de l'attention du garçon renfrogné ; il pensait que leur fréquentation à distance finirait pas laisser place à une connivence que ne serait qu'à eux, que même si c'était plus long qu'à l'accoutumée, il finirait par renoncer à ses moues furibondes et son regard assombri. La succession des mois l'a bien vite détrompé, et il lui est devenu évident que, bien plus que de l'indifférence un peu rétive, c'était une aversion véritable qui lui était portée – et il n'a pas fallu bien longtemps à Hector pour en comprendre les raisons. Ainsi, il n'a jamais retourné cette détestation courroucée, acceptant la distance et l'antagonisme comme pour compenser ses privilèges et la culpabilité qui était la sienne de pouvoir en jouir sans mal tandis que, simultanément, d'autres souffraient tant de leur absence.

Alors, ce jour-là, tandis que s'agitent autour de lui des faces souriantes, amicales, curieuses de déchiffrer les quelques mots dont il a orné son petit carnet clair, simulacre de vers, frêles fondations qui, peut-être, soutiendront plus tard un poème plus solide, Hector prend la décision de s'en éloigner. Il leur fait ce petit sourire plein d'humilité, qui tient presque de l'excuse, et prend congé d'eux, leur promettant le droit d'une lecture ultérieure, promesse à demi-mot qu'ils oublieront très probablement, puisque ce qu'ils retiennent du garçon,  ce n'est guère que le reflet qu'ils voient au fond de ses yeux attentifs et attentionnés. Et c'est aussi ce qui fait la singularité des rapports froids qui existent entre lui et Zachariah – ces rapports-là, il ne les entretient qu'avec lui. Et il y a en eux quelque chose de si terriblement vrai, comme l'une de ces vérités qui frappent le cœur et fouettent l'âme. Quelque chose qui fait pulser son cœur d'artiste bien plus puissamment que les liens décatis et conventionnels qu'il partage avec les autres.Quelque chose qui a fait naître au fond de lui une attraction nouvelle, une attraction que, même des années après, il ne parviendra toujours pas à qualifier avec justesse. Une attraction qui l'éloigne de ses schémas prédéfinis, de ses réflexes sociaux, ceux qu'il a acquis au fil des interactions menées avec le reste du monde.

Car c'est cela : depuis le début, depuis le premier jour, il y a le reste du monde, et il y a Zachariah. Il y avait Hector, qui se ternissait à force de jouer aux mêmes personnes la même comédie éculée, et puis il a surgi, avec ses yeux et leur luisant furieux, avec ce mépris si évident, avec cette énergie qui remue jusqu'aux tréfonds d'un être. Il y a ce garçon, qui bouleverse ses calculs et le ramène à sa condition d'être sentimental, à sa sensibilité si particulière de poète ; ce garçon qui enraye tous les rouages de sa comédie sociale. Alors qu'il s'était fixé comme règle de ne jamais effacer la distance entre eux, c'est cette attraction mystérieuse, à l'ampleur nouvelle, qui le pousse à l'approcher, ce jour-là :
– Bonjour, je –
Lui qui s'apprêtait à se présenter se sent terriblement banal, incolore, insipide – et il l'est probablement aux yeux de Zachariah. Alors, il préfère lui faire cette proposition un peu gauche, de but en blanc :
– Tu sais, si tu n'aimes pas être seul, peut-être que je peux essayer d'aider ?
Et banal, et incolore, et insipide, ça l'est peut-être pour Hector l'adulte, qui pose sur cette interaction un regard rétrospectif – c'est qu'il oublie bien vite qu'il a eu six ans, qu'il a balbutié, qu'il a appris, qu'il a bâti. Il n'oublie pas, cependant, qu'il a fait date, ce jour-là, pour les deux garçons, pour cette relation, doucement façonnée aux courants d'une existence sombre, forgée au feux des feintes et des non-dits. Ce jour-là, au contact de Zachariah, Hector a dans la voix les maladresses tremblantes d'une réserve qui n'a jamais été la sienne...


CODAGE PAR AMATIS
AVATARS PAR HEY BABINE ET PRETTY GIRL
Revenir en haut Aller en bas
Zachariah Loganach
Zachariah Loganach
épargné(e)
avatar // crédit(s) : Axel Auriant // slytherimpala ~ solosands
âge : 23 ans
statut marital : plus célib' tu meurs

Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Black-aesthetic-gif-8



métier : loser professionnel
carcasse : Mortel, si désespérément mortel, fragile à tous les instants, soumis à la vacuité du cycle de la vie : on nait, les années passent, puis on meurt. Chouette existence que celle d’un humain, franchement.
damnation : Aux sombres héros de l'a(mer) // vivre sur une île et avoir le mal de mer ? Ouais, incroyable mais vrai. Quand il était petit, son père a essayé de l'emmener sur son bateau de pêche pour qu'il devienne un homme, un vrai, et cette sortie n'a été que la confirmation du désespoir de William Loganach vis-à-vis de son fils. Zachariah est issu d'une longue lignée de marins et de chasseurs de baleine, il est censé avoir le pied marin, et pourtant... Rien à faire. S'il met un pied sur un navire, la nausée le saisit immédiatement, suivi de vomissements atroces s'il persiste à vouloir rester sur les flots.

échanges : 242
arrivée : 21/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Mar 21 Avr - 23:14

date du rp ≈ 02 février 1966
lieu du rp ≈ Ecole


Souviens-toi de l'automne

Hector & Zach ☆ Chaque soir de mon enfance, je rentrais à la maison poursuivi par l’école. Mes carnets disaient la réprobation de mes maîtres. Quand je n’étais pas le dernier de ma classe, c’est que j’en étais l’avant-dernier.
☾ ⋆  ☾ ⋆ ☾ ☼ ☽ ⋆ ☽ ⋆ ☽

Les saisons, à Selkirk, se ressemblent toutes : alors que l’automne laisse sa place à l’hiver, le crachin reste le même, tout comme le vent et le froid cinglant qui traverse les vêtements sans jamais totalement glacer le sang. Les enfants de l’école, entassés les uns les autres dans deux classes mélangeant petits et grands, orphelins et gamins de bonnes familles, apprennent ce que c’est que de vivre sur cette île, un jour à la fois – ils doivent se conformer à ce que les adultes attendent d’eux, au risque de faire partie des intrus, des parias dont on ne parle jamais que pour avertir de leurs méfaits. Il essaie, Zach, de se fondre dans le moule. Il ne veut qu’une chose, c’est qu’on soit fier de lui, ou au moins, qu’on arrête de répéter, à chaque fois qu’on daigne s’intéresser à lui, à quel point il n’est pas à la hauteur des attentes de ses parents : le fils ainé des Loganach, certes, loin d’être une famille riche mais propre sur elle, ancrée dans les racines de Selkirk depuis des générations, des gens pieux et, on s’accorde tous à le dire, des gens bien, se doit de suivre le chemin tout tracé pour lui, la route de la mer, la voie du labeur. Hector Desmond, lui, se trouve dans une situation bien différente ; et, dans l’esprit du jeune Zachariah, pratiquement idyllique. Il est aimé, choyé, et surtout, il a la main mise sur son destin. Seul le temps peut prétendre savoir ce qu’il va choisir de faire de sa vie.

Pourtant, ce n’est pas la seule raison pour laquelle il hait Hector, d’une haine enfantine incompréhensible, qui ne peut être mue par la raison. Ses poings se serrent de toutes ses forces, il ne sait pas comment exprimer sa colère, pas encore, en tout cas. Plus tard, ses phalanges s’écorcheront sur les chairs et le sang viendra tâcher sa peau ; pour l’instant, il se contente d’observer et d’attendre que vienne son heure. Parce que comment expliquer aux adultes, après tout, le pourquoi de cette hargne ? Ils ne pourraient pas comprendre, ils ne comprennent jamais. Il est tout ce qu’il aimerait être, Hector, mais il ne l’est pas. Et son père lui tape dessus chaque jour que Dieu fait, et il ne peut pas rendre ses coups, et il se sent impuissant, et le fait de détester son camarade, ça, il peut le contrôler. Et le petit garçon a plein d’ami, et lui il est seul, beaucoup trop seul, et personne ne veut jouer avec lui parce que c’est un cancre et que personne n’aime les cancres. Et tout s’emmêle dans sa tête sans qu’il ne puisse l’arrêter, et il voudrait que ça s’arrête et le coupable de tous ses maux, c’est Hector, alors il hait Hector et puis c'est tout.

Le petit garçon continue de maugréer dans sa barbe, de taper sur les cailloux à l'aide de sa chaussure trop petite pour lui – ses pieds grandissent trop vite, et sa mère est lasse de devoir racheter des nouveaux vêtements, donc il garde ses frusques, tant pis pour son confort. L’argent ne pousse pas dans les arbres, on lui a dit et répété. Perdu dans sa colère, il manque presque de voir Hector s’avancer : pourtant, il ose, le bougre. Il rompt le status quo et se dirige vers Zach sans vergogne, sacrilège, dans la tête du Loganach qui se sent attaqué par sa simple présence. La voix fluette, trop jeune pour tant de véhémence, retentit dans l’air en réponse, comme un coup de fouet :

« - Vas-t-en, Desmond. Retourne avec tes copains, moi, j’suis pas ton copain. Les enfants ont cette propension fabuleuse d’exposer des faits implacables, et ce, sans prendre de gants – et c’est particulièrement flagrant ici, puisque Zach ne craint en rien d’offusquer son camarade de classe. J’veux pas que tu m’aides ! J’ai pas besoin d’aide ! J’suis seul si j’veux d’abord. »

Les mains dans ses poches, le regard revêche : il souffle sur une mèche de ses cheveux un peu trop longs, qui tombent sur son front et masquent sa vue – véritable taureau dans l’arène, bœuf trépignant dans son box jusqu’à ce que la vision carminée embaume ses sens. Pauvre Hector, réceptacle innocent d’un acharnement qu’il n’a pas mérité ; il faut un coupable, et il reçoit les coups de couteau un à un. Le Christ est mort pour les péchés des hommes – et pour l’absolution de Zach, il faudra qu’Hector revête une couronne d’épines.

Codage par Magma.
Revenir en haut Aller en bas
https://abime.forumactif.com/t431-zachariah-what-s-up-danger#5292 https://abime.forumactif.com/t439-the-party-the-after-party
Hector Desmond
Hector Desmond
épargné(e)
avatar // crédit(s) : charlie heaton // flow (la meilleure)
âge : 23 ans
"On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,
On monte. Quelle est donc cette aube ? C’est la tombe."

métier : poète en herbe
carcasse : mortel
échanges : 49
arrivée : 22/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Dim 3 Mai - 16:51

date du rp ≈ 2 février 1966
lieu du rp ≈ école

souviens-toi de l'automne


Hector — Zach

fais-moi une place au fond d'ta bulle, et si j't'agace, si j'suis trop nul, je deviendrais tout pâle, tout muet, tout p'tit, pour qu'tu m'oublies



Il a dû apprendre les autres, Hector – il a dû apprendre les autres pour parvenir à s'oublier, effacer l'incomplétude, gommer le sang et la colère ; quête d'une existence tournée vers autrui, hurler au monde son désir de plénitude. Se placarder à la face un sourire aussi grand que le trou au fond de son cœur, se repaître des mots des autres, avide de l'altérité qui lui permettra de s'éloigner de lui-même. Petit garçon d'apparences, déjà, être de dichotomies et de chimères – solaire façade, chaleur de la gestuelle, attention portée à tous ; mais vacuité fondamentale, étreinte visqueuse des ténèbres sur le cœur d'enfant. Alors il lui a fallu s'emmurer, refouler au fond de lui ses pulsions d'auto-destruction, avant même de pouvoir les comprendre ou les qualifier – il ne sait pas, petit Hector, d'où lui viennent ces pensées qui parasitent son bon fonctionnement, il ne comprend pas pourquoi des voix désincarnées viennent lui souffler des murmures mortifères à l'oreille une fois les autres à distance, une fois la sinistre solitude retrouvée. Il sait toutefois, par une intime conviction, de l'ordre de l'instinct, que c'est cette altérité qui lui sera salvatrice, qui lui permettra de se défaire de sa noirceur intrinsèque – que c'est vers elle qu'il doit tendre, impérativement ; sa survie dépend toute entière de son acceptation au sein du groupe social, le fait est là. Alors il a appris, petit Hector, littéraire en devenir, à lire les cœurs comme des écrits ; à chaque âme, son style, ses mots, sa couleur – synesthésie d'apprenti poète, qui l'aide à appréhender celui qui lui fait face.

A son examen analytique de l'autre succède, dans l'esprit du garçon, une simulation intérieure d'interactions, différant radicalement les unes des autres, et ce afin de déterminer comment réagir face à telle personne dans telle ou telle situation ; c'est, en lui, une intellectualisation permanente du lien social, et ce, dans l'unique optique d'être accepté et apprécié, dans l'espoir de chasser en lui la haine et le manque, ne serait-ce que l'espace d'une petite seconde – petite seconde pour qu'il respire mieux, petit Hector, pour que ses nuits ne le laissent pas grelottant, secoué de tremblements incontrôlables, mangé d'une amertume tristement précoce, l'âme enlinceulée de désespoir et de résignation. C'est là l'unique solution qu'il a trouvée – fuir son intériorité fataliste et malveillante, embrasser l'horizon scintillant de l'altérité dans toute son ampleur. Il a appris les autres, avide de se fuir, de se précipiter hors de lui-même – appétit de l'autre, de l'interaction, d'une distraction. Oui, il y a quelque chose d'étrange chez ce garçon, une sociabilité affamée, démesurée, qui intrigue même les plus extravertis – c'est qu'il sourit trop, Hector ; il vous donne l'impression de n'exister qu'à travers vous. Il vous semble que rien ne trouvera davantage de grâce à ses yeux que votre compagnie, et que chacun de vos mots lui est trésor à chérir. Et c'est en partie vrai – comme il aimerait, petit Hector, se défaire entièrement du gouffre de son intériorité estropiée ! Vivre entièrement à l'aune des autres et de leur proximité, sentir la chaleur de leur considération affluer dans sa chair, se repaître de la sincérité qui ourle leurs rires... Il la convoite, cette vie-là, sans moi, sans ego, cette vie sans lui...

Et malgré les tensions qui caractérisent son lien avec Zachariah, il fait tout autant partie de son quotidien, ce lien, il compte parmi es rapports qui lui permettent de se dérober à lui-même ; le préserver est vital à Hector ; et peu importe s'il se fait cible, peu importe si en l'autre la haine enfle, incendie au fond des yeux bleus qui fait les gestes fiévreux et les mots sifflants – qu'importent les injures crachées, le mépris affiché, l'inimitié assumée... pas vrai ? Tant pis si au fond de lui s'amasse une affliction toute nouvelle, qu'il ne connaît qu'auprès du petit Loganach, comme un millier d'aiguilles fichées au fond de son cœur, comme si on l'avait étranglé ; torsion cruelle du corps tout entier, l'émotion qui fige les chairs. Et plus l'animosité se laisse lire sur les traits du brun, plus il tremble, petit Hector, plus il se sent sombrer – sombrer au fond des épaves de son for intérieur, sombrer à nouveau, frissonner, s'engoncer au creux de ses abysses personnelles. A trop fréquenter Zachariah, fort de sa franchise et de sa hardiesse, il sent sa façade se lézarder – il sent monter en lui ce qu'il a soigneusement muselé, bile noire, mélancolie venimeuse ; toute sa vie de petit être tourmenté, un chagrin de sang et de nuit. Car il voit bien d'où vient la haine qui lui est vouée, avec une ardeur qui paraît trop intense pour le petit corps qui l'abrite – les apparences et les circonstances les ont jetés aux antipodes l'un de l'autre, Zachariah et Hector, faisant naître chez le premier l'animosité éperdue, désespérée. Et il conçoit qu'on l'exècre, le petit poète – après tout, il a la chance de pouvoir compter sur une situation matérielle plus que confortable qui le préserve d'un certain nombre d'angoisses, ce qui n'est manifestement pas le cas du Loganach.

Il comprend l'aigreur, Hector, il comprend l'amertume, il comprend la rancune – il les comprend, véritablement, mais il a toujours au cœur cet espoir minuscule de pouvoir mettre fin à ce cycle de colères et de détestations, de changer les choses entre eux deux. Il a en lui cet idéalisme naïf, trait étonnamment enfantin chez un être si précoce, ces illusions douceâtres qui lui permettent d'espérer même dans les pires secousses. Cet espoir persistera en lui même une décennie plus tard, alors que seront passées les affres brûlantes de l'adolescence – il ne renoncera jamais à Zachariah, Hector. Son franc-parler teinté de courroux ne le surprend plus, il a appris à ne plus s'en offusquer – à passer outre, à recommencer, à n'afficher qu'une certaine neutralité piquée de distance. C'est donc ainsi qu'il oriente sa réponse :
– J'ai déjà passé du temps avec eux aujourd'hui.
Il n'ajoute pas le et j'aimerais en passer avec toi maintenant qui lui brûle les lèvres et qu'il menace, dans un élan de sincérité qui fait écho à celle du Loganach, de laisser échapper – il ferait fuir son vis-à-vis, ou attiser sa colère – il lui faudra un semblant de subtilité...
– C'est dommage tu sais, j'suis sûr qu'on pourrait faire quelque chose de bien...
Il décide de s'installer en tailleur en face de son interlocuteur bougon, petit Hector, prenant bien soin de ne pas envahir son espace personnel – il a appris, à son jeune âge déjà, que forcer une proximité aussi brutalement ne conduit guère qu'à la méfiance au mieux, à l'évitement complet dans le pire des cas. Qu'à cela ne tienne – il sera doux, il sera tranquille, il attendra. Pour l'heure, il se contente donc de demander :
– Ah bon, ça ne te dérange pas d'être seul ?
Quelque chose de candide dans la voix, un intérêt véritable pour une personnalité qui lui est diamétralement opposée – comprendre pour apprendre, volonté de la graine de poète d'embrasser la solitude à son tour.


CODAGE PAR AMATIS
AVATARS PAR HEY BABINE ET PRETTY GIRL
Revenir en haut Aller en bas
Zachariah Loganach
Zachariah Loganach
épargné(e)
avatar // crédit(s) : Axel Auriant // slytherimpala ~ solosands
âge : 23 ans
statut marital : plus célib' tu meurs

Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Black-aesthetic-gif-8



métier : loser professionnel
carcasse : Mortel, si désespérément mortel, fragile à tous les instants, soumis à la vacuité du cycle de la vie : on nait, les années passent, puis on meurt. Chouette existence que celle d’un humain, franchement.
damnation : Aux sombres héros de l'a(mer) // vivre sur une île et avoir le mal de mer ? Ouais, incroyable mais vrai. Quand il était petit, son père a essayé de l'emmener sur son bateau de pêche pour qu'il devienne un homme, un vrai, et cette sortie n'a été que la confirmation du désespoir de William Loganach vis-à-vis de son fils. Zachariah est issu d'une longue lignée de marins et de chasseurs de baleine, il est censé avoir le pied marin, et pourtant... Rien à faire. S'il met un pied sur un navire, la nausée le saisit immédiatement, suivi de vomissements atroces s'il persiste à vouloir rester sur les flots.

échanges : 242
arrivée : 21/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Mar 5 Mai - 17:30

date du rp ≈ 02 février 1966
lieu du rp ≈ Ecole


Souviens-toi de l'automne

Hector & Zach ☆ Chaque soir de mon enfance, je rentrais à la maison poursuivi par l’école. Mes carnets disaient la réprobation de mes maîtres. Quand je n’étais pas le dernier de ma classe, c’est que j’en étais l’avant-dernier.
☾ ⋆  ☾ ⋆ ☾ ☼ ☽ ⋆ ☽ ⋆ ☽

Lorsqu’il a ouvert pour la première fois les yeux sur le monde dans lequel il venait de naître, le bébé au creux des bras d’Ann Loganach a pleuré. Il y avait tant de bruit, tant de couleur, tant d’agitation autour de lui : il pouvait voir, du coin de l’œil, un homme bourru aux grandes mains calleuses et à la moustache fournie qu’il devrait appeler Papa, poser sur lui un étrange regard. Parce que Zachariah était trop frêle à son goût, né avec quelques semaines d’avance – Dieu les punissait-il de leurs pêchés en leur donnant un enfant si fragile, alors même que leur aîné était destiné à devenir marin-pêcheur, comme l’était son père avant lui ? Il pouvait ressentir la gêne de sa mère, aussi, l’amour inconditionnel que devrait ressentir n’importe quel parent envers son nouveau-né mêlé d’un embarras tout particulier vis-à-vis de son mari. On lui a appris qu’elle devait écouter William et être de son côté, quoi qu’il advienne, femme soumise à la volonté d’un patriarcat implacable : et si sa nature la pousse à chérir l’être qu’elle tient contre son sein, c’est son éducation qui finira par l’emporter.

Zach a grandi, malgré tout – les regards de ce père pour qui il ne serait jamais à la hauteur, peu importe ses efforts, les médisances d’une société qui placent les gamins comme lui dans des cases qui n’ont de sens que dans une hiérarchie arbitraire et injuste, le manque d’amour et d’affection qui laisse un vide atroce dans ses entrailles. Il n’a pas encore mué qu’il a compris que la vie ne lui ferait pas de cadeau et qu’il devait tracer sa propre voie, puisqu’il était indigne de celui qu’on avait tracé à la craie pour lui : et s’il laisse échapper ses larmes lorsque la nuit vient peupler sa tête de songes d’une vie plus douce, il ne laisse rien paraître lorsqu’il est en présence de ses petits camarades, à l’école. Sa colère, c’est ce qui lui permet de continuer à avancer, tel le fioul d’un navire au moteur percé, versant dans l’océan une chape de gasoil noir comme l’abîme. Sa colère, c’est son gilet de sauvetage. Alors, par réflexe instinctif, vieux reste, peut-être, d’un instinct millénaire où l’homme était proie plutôt que prédateur, il sort les griffes tandis qu’Hector, en face de lui, n’affiche rien qu’une bonhommie bienveillante.

« - Pourtant, on dirait qu’ils veulent encore de toi, eux, et l’roi devrait pas les faire attendre, dit-il d’une voix pernicieuse, que certains diraient dérangeante, venant de la bouche d’un si petit garçon. Pourtant, c’est vrai, les amis d’Hector le réclament à grand cris, l’invitant à des jeux à l’autre bout de la cour de récréation – privilège dont Zach est exempt, bien entendu. J’veux rien faire avec toi, de toute façon. Si tu restes là, j’vais te taper, tu m’entends ?

Et il a déjà tellement de problèmes avec ses professeurs, le fils Loganach : si ses petits poings ne font pas encore grand mal, la fine baguette du maître qu’il abat sur ses doigts lorsqu’il fait des bêtises est cinglante. Pourtant, il n’aurait pas peur de mettre ses menaces à exécution. Mieux vaut se faire frapper que d’affronter ses démons ; mieux vaut se complaire dans une douleur qu’il connait bien, puisqu’elle est quotidienne, que de courir le risque de se blesser plus encore, en laissant entrer dans sa vie une personne qui finirait forcément par le décevoir, il en est persuadé. Et puis, Hector Desmond, celui qu’il hait autant qu’il jalouse, celui qui grignote la moindre de ses pensées rationnelles, celui qu’il refuse de regarder en face parce qu’il aurait peur d’être ébloui par son bonheur, lui, l’enfant qui ne sait pas vraiment ce que c’est que d’être heureux – il est impensable qu’ils soient autre chose qu’antithèses, autre chose que le sacrificateur et le sacrifié, et ce, peu importe qui finit par remporter le titre.

- Dégage de là, j’te dis ! T’as rien de mieux à faire que m’embêter ? Voilà qu’il crie, maintenant, de cette détresse toute enfantine qui fait serrer les poings et perler les larmes au coin de yeux. Je te déteste ! Va-t’en ! Va-t’en, va-t’en ! »

Ce sont des hurlements, maintenant, qui résonnent dans la cour. Autour d’eux, le silence. Tout le monde les regarde, petits et grands, et Zach a l’impression d’être un clown dans un cirque – pourtant, pas de maître Loyal à l’horizon. Il sait qu’ils le détestent tous, et qu’ils plaignent le pauvre petit Hector qui se fait embêter par le monstre qu’il est. Il saute sur ses pieds, il tempête, il gronde, et cela ne fait que renforcer la gêne qu’ils ressentent face à ce gamin qui dérange, par ses mots, ses gestes, sa simple présence. Mais au moins, il existe à travers cette haine. Il s’en repaît, parce que ces regards, fussent-ils emplis de pitié, ont le mérite de lui donner la preuve qu’il est bel et bien vivant.

Codage par Magma.
Revenir en haut Aller en bas
https://abime.forumactif.com/t431-zachariah-what-s-up-danger#5292 https://abime.forumactif.com/t439-the-party-the-after-party
Hector Desmond
Hector Desmond
épargné(e)
avatar // crédit(s) : charlie heaton // flow (la meilleure)
âge : 23 ans
"On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,
On monte. Quelle est donc cette aube ? C’est la tombe."

métier : poète en herbe
carcasse : mortel
échanges : 49
arrivée : 22/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Sam 9 Mai - 18:26

date du rp ≈ 2 février 1966
lieu du rp ≈ école

souviens-toi de l'automne


Hector — Zach

fais-moi une place au fond d'ta bulle, et si j't'agace, si j'suis trop nul, je deviendrais tout pâle, tout muet, tout p'tit, pour qu'tu m'oublies




Hector n'a jamais beaucoup connu les colères ; c'était, petit déjà, un enfant remarquable de silence et de sagesse, un être placide qui vous offrait des sourires comme des sucreries – il y avait de l'irrésistible dans ce dévoilement désintéressé des dents à peine formées, quelque chose d'irremplaçable et de délicieux, à en gonfler de fierté le cœur de ses parents. Et il a continué à germer en ce sens, petit Hector, bourgeon à la droiture impeccable, sentier sans sinuosités, brise à l'ondulation tranquille – une façade sans faille, falaise culminante sans anfractuosité, perfection apparente d'un être qui se réalise exclusivement à l'aune des autres. Alors oui, il a eu cette chance-là, le petit poète, d'avoir connu la chaleur d'une fierté parentale quasi-constante, de n'avoir jamais été la cible ni des haines ni des courroux ni des mépris ni des accusations – d'avoir pu se développer sans abus familiaux, sans dysfonctionnements au sein du foyer. Il sait sa chance, Hector. A son jeune âge, déjà, il a appris à ne pas se contenter de la suavité fallacieuse des apparences ; pour lui, qui les manipule avec tant de maestria, il est évident qu'elles ne reflètent guère que ce que l'on veut qu'elles reflètent – de fait, penser connaître un être dans toute sa profondeur, dans la complexité qui lui est propre, avec ce qu'il laisse paraître comme seule donnée, c'est se fourvoyer fondamentalement ; il y a quelque chose de presque insultant pour la singularité qui est celle de chaque être humain – eh quoi, il suffirait de fréquenter quelqu'un quelques temps, de se satisfaire de ce qu'il veut bien vous donner dans le cadre de vos interactions sociales, il suffirait de le voir sourire une vingtaine de fois, rire aussi, parfois, pleurer, peut-être, pour prétendre le connaître jusqu'aux tréfonds de son cœur, jusqu'aux souterrains de son âme ?

Hector n'a jamais fait cette offense à l'humanité, l'humanité dans tout ce qu'elle peut avoir de riche, de  secret et d'intestin – il a préféré, pour jeter entre lui et les autres les fondations d'un lien social, miser sur l'observation minutieuse, méticulosité dans les interactions, attention prêtée à chaque mot, chaque sourire, chaque pli des lèvres – déchiffrer l'autre comme on déchiffre une énigme, avec la même curiosité fascinée. C'est au contact des autres qu'il a rencontré la colère, la vraie – les furies enfantines, qui jettent les petits au sol, sanglots comme des geysers au coin des paupières, lèvres qui laissent échapper des hurlements stridents, volonté d'attraper l'attention des adultes dans ce manège qui a en lui du théâtral ; le courroux adulte, ensuite – instants hostiles volés à ses parents, lorsqu'ils se pensaient seuls, la voix qui grimpe vers les aigus de sa mère, qui va parfois jusqu'à côtoyer le grondement dans le cas de son père. Il a fini par saisir la majorité des enjeux liés à la colère, la manière dont se propage la violence au fond des cœurs furieux, la chaleur destructrice qui fait sauter les scrupules et les bienséances, désinhibant comme une liqueur vénéneuse – il a appréhendé ce qui fait la singularité d'un ressenti aussi ardent, sans pour autant en comprendre réellement l'intensité. A lui qui n'a jamais été furieux que contre lui-même, pareilles véhémences à l'égard d'autrui sont inconcevables – il ne parvient pas à admettre que l'on puisse consumer les autres au brasier d'un courroux, à la déflagration d'une colère quelconque, si justifiée qu'elle puisse être à l'origine.

Alors oui, il conçoit très bien l'amertume de Zachariah, Hector – il en connaît partiellement les raisons, et elles lui semblent tout à fait justifiées ; le fait est que, du haut de sa naïveté d'enfant, il s'imagine pouvoir gommer toute la rage, toute la haine, toute l'ardeur développée par son camarade à le détester, toute la véhémence mise dans les injures et les rejets ; il se figure un lien apaisé, où les sourires auraient remplacé les rictus, où son prénom se serait substitué aux Desmond crachés comme à un chien – un lien d'amitié. Il y a déjà en lui, l'idéalisme du poète, espoir semé en lui depuis la naissance, volonté frénétique de combler l'incomplétude – il ne veut plus être seul, Hector, il ne veut plus faire face à ce qui bée au fond de lui ; il quête en les autres une plénitude vénérée. Et s'il faut pour cela se dresser face au Loganach, laisser passer la haine et l'aigreur comme on laisse passer une tornade dans l'attente de l'accalmie, soit – il fera face aux élevées tempétueuses de la voix, aux menaces de violences, à l'arrogance piquée d'animosité ; il veut bien laisser le jeune homme le cribler de mots acides, le laisser employer à son égard les  termes les plus blessants, se faire cible diligente, si cela peut avoir le mérite de combler à la fois son besoin de fréquenter autrui et celui de Zachariah de laisser déferler la furie qui s'est nichée jusqu'au fond de lui.

Il reste donc de marbre face aux sèches éructations de celui qui voit en lui son pire ennemi, sourd, du moins en apparence, à l'âpreté de l'exécration qui suinte de chacun des mots – il a appris à refouler sa fierté, à la museler convenablement ; car s'il brille par sa patience, Hector, il n'en demeure pas moins qu'il pulse au fond de lui, cet orgueil, que la fréquentation chaotique de son camarade a sévèrement outragé – elle est cheval qui rue, au fond de son cœur, cette fierté, elle voudrait se cabrer, rendre les coups, frapper jusqu'à en oublier son propre nom. Car il y a du véhément en lui, autant qu'il y en a en Zachariah – seule diffère la gestion de cette colère qui bouillonne au fond des viscères : aliéner la raison, rire au nez des conventions dans le cas du Loganach ; faim de sociabilité et tentatives éperdues de catharsis poétique pour ce qui est d'Hector. Leurs divergences les placent aux pôles l'un de l'autre, mais le poète ne renoncera pas – il sent, au-delà de ce qui les éloigne, le même fil rouge, celui sur lequel ils tentent tous les deux d'évoluer – celui d'une existence à la pénibilité amère, à l'âpre violence, d'une existence qui agite en eux le germe d'une folie fondamentale ; à laquelle ils tentent d'échapper, avec le même désespoir, la même douleur au fond du cœur. Alors il ne réagit pas aux provocations de Zachariah, le poète, et il se contente de lâcher :
– Si je suis plus avec eux, c'est fait exprès, j'voulais juste essayer d'être avec toi, un petit peu. Mais bon...

Et les cris de son camarade se font soudains plus stridents, plus véhéments – désespoir d'un cœur qui hurle, le corps qui tremble aux assauts d'une haine trop violente pour la chair frêle. Il voit bien les regards qui coulent dans leur direction, Hector – et il sent, fait rare, monter en lui un agacement âpre, qui lui tapisse la gorge et fait se durcir légèrement sa petite voix lorsqu'il se tourne vers les autres enfants pour leur demander :
– Vous avez pas mieux à faire que nous dévisager ? Il se passe rien de spécial ici.
Il a pris soin de moduler son timbre pour qu'il se situe entre fermeté, détermination un brin irritée et neutralité sans malveillance aucune – il sait le respect qu'ont les autres petits à son égard, et il connaît assez leurs susceptibilités pour évaluer le degré d'insolence et de crispation qu'il peut se permettre en leur compagnie. Il n'a pas spécialement réagi ainsi pour s'attirer la sympathie de Zachariah – sa naïveté, bien qu'indéniable, n'a pas cette démesure-là – mais davantage par réelle crispation ; il aimerait que les autres restent tout à fait en dehors de ce qu'il partage avec son camarade, quand bien même il ne s'agit que de haine brûlante et de colère méprisante, que de détestation consumant le Loganach jusqu'aux tripes et d'une hostilité ardente lui faisant brandir férocement le poing en direction du petit poète. Il y a en Hector cette volonté de préserver cette flamme bien étrange qui s'agite entre eux, toute malsaine et destructrice qu'elle soit – pas question de laisser quiconque s'en approcher : il s'y oppose sans avoir toutefois vraiment conscience de ses agissements, presque à la manière d'un instinct bestial de protection, inexplicable, illogique, incohérent – improbable chien de garde que le petit Hector en cet instant.


CODAGE PAR AMATIS
AVATARS PAR HEY BABINE ET PRETTY GIRL
Revenir en haut Aller en bas
Zachariah Loganach
Zachariah Loganach
épargné(e)
avatar // crédit(s) : Axel Auriant // slytherimpala ~ solosands
âge : 23 ans
statut marital : plus célib' tu meurs

Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Black-aesthetic-gif-8



métier : loser professionnel
carcasse : Mortel, si désespérément mortel, fragile à tous les instants, soumis à la vacuité du cycle de la vie : on nait, les années passent, puis on meurt. Chouette existence que celle d’un humain, franchement.
damnation : Aux sombres héros de l'a(mer) // vivre sur une île et avoir le mal de mer ? Ouais, incroyable mais vrai. Quand il était petit, son père a essayé de l'emmener sur son bateau de pêche pour qu'il devienne un homme, un vrai, et cette sortie n'a été que la confirmation du désespoir de William Loganach vis-à-vis de son fils. Zachariah est issu d'une longue lignée de marins et de chasseurs de baleine, il est censé avoir le pied marin, et pourtant... Rien à faire. S'il met un pied sur un navire, la nausée le saisit immédiatement, suivi de vomissements atroces s'il persiste à vouloir rester sur les flots.

échanges : 242
arrivée : 21/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Lun 11 Mai - 22:43

date du rp ≈ 02 février 1966
lieu du rp ≈ Ecole


Souviens-toi de l'automne

Hector & Zach ☆ Chaque soir de mon enfance, je rentrais à la maison poursuivi par l’école. Mes carnets disaient la réprobation de mes maîtres. Quand je n’étais pas le dernier de ma classe, c’est que j’en étais l’avant-dernier.
☾ ⋆  ☾ ⋆ ☾ ☼ ☽ ⋆ ☽ ⋆ ☽

Qu’est-ce que le temps sinon l’attente ? L’espérance de jours meilleurs, l’anxiété d’un futur qui n’est tangible qu’au seul instant où il n’est plus – où il devient présent. Le petit garçon essaie de patienter mais ne peut que se languir d’un avenir plus doux : il ne peut prédire s’il finira vraiment par arriver, mais c’est tout ce à quoi il peut se raccrocher. Triste est la désillusion de l’enfance, celle qui qui accepte son propre sort en se réfugiant dans les rêves de demain ; sombre est cette mélancolie mouchetée d’optimisme, la seule lumière qui perce à travers une obscurité trop dense pour être supportable. Il est en colère contre le monde entier pour éviter de perdre pied, Zachariah, parce que la hargne est moins difficile à supporter qu’une affliction constante. Et quel meilleur réceptacle de cette colère qu’Hector Desmond ? Que cachent les nuages, après tout, sinon le soleil qui brille dans le ciel ? Elle ne pourrait être aussi vive, aussi efficace, son aigreur, envers quelqu’un d’aussi brisé que lui : et il s’attarde sur les apparences et les sourires de son camarade, simplement parce que c’est ce qu’on lui a inculqué - on ne fait que reproduire les schémas que l’on peut observer autour de nous.

Il hausse les épaules alors qu’Hector ne fait que pointer du doigt l’évidence. N’a-t-il pas conscience de la chance qu’il a, à se faire révérer ainsi par les autres enfants de son âge, à ce qu’on recherche sa présence plutôt que de se faire rejeter ? Zachariah donnerait tout pour pouvoir marcher dans ses traces, au moins l'espace d'une journée. D’être né dans une famille aux allures de conte de fées, de ne pas avoir à s’inquiéter des humeurs de son père ou de son haleine alcoolisée, d’avoir tant d’amis qu’il peine à les compter : voilà qui serait une existence aux antipodes de la sienne. Pourtant, il est prêt à tout risquer, son ennemi, puisqu’il ose les défier en usant de son autorité naturelle, celle induite implicitement par la popularité – et s’il devrait être reconnaissant envers Hector et son incitation à ce que les autres enfants cessent de le traiter comme un monstre de foire qu’il faut pointer du doigt, il n’est pas encore assez mature pour reconnaître ce geste pour ce qu’il est, le fils de pêcheur. Tout ce qu’il voit, c’est Desmond le magnanime qui le prend en pitié – Desmond le roi qui fait tout pour qu’on embrasse sa bague. La cour résonne encore des cris de Zach mais il ne s’arrête pas pour autant et se précipite sur le poète en herbe, bien décidé à mettre à exécution ses menaces : mais à l’instant où il s’apprête à le pousser avec autant de force qu’un gamin de six ans est capable de le faire, comme venu de nulle part, le maître l’attrape par le col de son uniforme beaucoup trop grand pour lui et le soulève de plusieurs centimètres dans l’air, comme s’il était plus léger qu’une plume.

« - Encore à créer des problèmes, Monsieur Loganach ? Je vois que vous n’avez toujours pas appris de vos innombrables punitions. Vous allez me suivre pour vous expliquer avec le directeur, mais avant cela, excusez-vous auprès de Monsieur Desmond.

- J’ai rien fait d’abord ! J’m’excuserai pas, et pis lâchez-moi !

Il est ridicule, à agiter ses petits bras et ses jambes dans les airs, les poings serrés, les larmes menaçant déjà de s’échapper de ses grands yeux bleus.  L’adulte le regarde d’un air sévère – l’éducation ne s’embarrasse pas des sentiments, à cette époque où l’enfant est bouffon plutôt que roi. Et puis, se demander les raisons de ses excès de colère et de sa colère constante serait probablement trop de travail pour le professeur, qui ne fait certainement pas ce métier par vocation.

- Ça suffit, Loganach. J’espère que vous êtes prêt à recevoir la badine, c’est tout ce que vous méritez, de toute façon. »

Sans même jeter un coup d’œil à Hector qui assiste, impuissant, aux remontrances de l’adulte sur ce petit garçon qu’il pourrait écraser comme une mouche, le maître d’école s’éloigne en emportant avec lui Zachariah, qui se débat en vain. Une énième correction, une énième remontrance, un lot quotidien qui suivra le Loganach tout au long de sa scolarité - il voulait pourtant qu’on le laisse tranquille, voilà tout. Nul doute que cet épisode ne fera que renforcer la haine brûlante qu’il éprouve envers son camarade bourgeois – une hostilité qui le suivra tout au long de la puberté sans jamais faillir, jusqu’au moment où toutes ses convictions s’écrouleront comme un château de cartes : mais ça, personne ne peut le prévoir, et certainement pas les autres élèves de l’école qui reprennent déjà leurs conversations et leurs jeux sans se préoccuper du petit délinquant, dont ils ont déjà oubliés les frasques (en tout cas, jusqu’à la prochaine fois).

Codage par Magma.
Revenir en haut Aller en bas
https://abime.forumactif.com/t431-zachariah-what-s-up-danger#5292 https://abime.forumactif.com/t439-the-party-the-after-party
Hector Desmond
Hector Desmond
épargné(e)
avatar // crédit(s) : charlie heaton // flow (la meilleure)
âge : 23 ans
"On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,
On monte. Quelle est donc cette aube ? C’est la tombe."

métier : poète en herbe
carcasse : mortel
échanges : 49
arrivée : 22/03/2020


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty
Sam 16 Mai - 17:00

date du rp ≈ 2 février 1966
lieu du rp ≈ école

souviens-toi de l'automne


Hector — Zach

fais-moi une place au fond d'ta bulle, et si j't'agace, si j'suis trop nul, je deviendrais tout pâle, tout muet, tout p'tit, pour qu'tu m'oublies



Hector a toujours pu s'enorgueillir d'un certain contrôle exercé sur son existence – maîtriser son visage qui se tord pour former un rictus, l'incurvation de sa bouche qui lui façonne un sourire affable, sélectionner le moindre mot exprimé avec une rigueur toute littéraire. L'allure du petit poète est millimétrée, et ce depuis l'enfance – très vite lui est apparue l'évidence que Selkirk avait quelque chose de malsain et de périlleux, gueule béante de ténèbres à la salive de sang, promontoire hérissé de falaises sinistres, malmené par la furie des flots dentelés d'une écume abondante. Il a appris à se méfier des autres par un instinct qu'il ne s'est jamais expliqué – du primaire, de l'animal apeuré qui se tapit au creux de la pénombre, de celui qui agit sans en avoir conscience, presque simple témoin de ses actions. Il a consacré son petit brin de vie à bâtir autour de lui une forteresse, masque fermement cuirassé, se voulant impénétrable, bâtisse bien dressée aux solidités imprenables. Dès le premier jour il a senti en lui cette fragilité, cette incomplétude lézardant son être de haut en bas, faiblesse du fond de l'âme et fissure d'un bout à l'autre du cœur.  C'est un deuil bien étrange, que celui d'Hector ; le trépas qui s'est invité à la naissance, et le spectre d'un alter ego voué à ne jamais s'incarner. Il a lu toutes sortes de textes sur la mort et la manière de l'appréhender depuis qu'il a su lire, sans vraiment les comprendre au début. Il lui en est resté, au petit être tourmenté, une volonté farouche de ne rien laisser paraître de sa peine et de ses difficultés – pas question de s'exposer, pas alors que flotte autour d'eux cette atmosphère délétère et vénéneuse, pas alors qu'il a l'impression que le ciel guette sa moindre défaillance et que la foudre le menace de sa lumière tonitruante.

Alors Hector est enfant de la retenue, gamin composant avec le gouffre qui troue son cœur, s'essayant à la comédie sociale. Il n'a pas compris encore qu'il se livre par le biais de cette comédie, qu'il pense hypocrisie – il n'en est rien. Il a bel et bien en lui toute la douceur aimable qu'il présente au monde – sa sollicitude, il ne la feint pas ; il sélectionne ce qu'il trouve de meilleur au fond de lui, toute cette affection, toute cette attention portée à l'autre, et il les livre au monde. Il lutte chaque jour pour museler les pulsions autodestructrices, de rejet, de repli sur soi, pour ne laisser filtrer que la lumière, que la gentillesse, que les sourires placides et les rires tintinnabulants. Il mène ses interactions sociales d'une main de maître, adressant çà et là un mot encourageant, hochant la tête en signe d'intérêt, posant sur l'épaule une main affectueuse ou rassurante ; c'est presque mathématique : il a appris à associer les comportements aux réactions qu'ils suscitent chez les autres, et à établir des schémas d'interactions, auxquelles il se tient de manière générale. Bien sûr, pareils calculs peuvent sembler froids, inhumains presque – pourtant, ce n'est pas ainsi que les pense le petit Desmond ; il s'agit, pour lui, de s'assurer, et ce de manière quasi-infaillible, qu'il recevra des autres l'affection dont il a cruellement besoin. Interagir avec les autres, c'est comme composer un poème – il convient pour ce faire de prêter attention à la structure et aux liens qui se tissent au fur et à mesure que se bâtit la création. Dire d'Hector qu'il fait attention relève de l'euphémisme le plus outrancier ; il contrôle la moindre situation sociale...

Jusqu'à aujourd'hui. Aujourd'hui, lorsqu'il s'est approché de Zachariah, avec au cœur la proposition d'une trêve, se voulant le premier pas vers une entente moins glaciale entre eux deux, il s'est figuré, bien sûr, ayant du petit garçon furibond une certaine connaissance, résultats à la fois d'une observation poussée et d'une expérience personnelle de ses colères, qu'il n'allait probablement pas se montrer amical à son encontre. Il s'est imaginé les mots glaciaux de son camarade, la distance volontairement mise, les injures peut-être, les cris sûrement. Il avait prévu aussi l'attention agaçante des autres dans le cas où le courroux du Loganach serait plus sonore que sifflé entre ses dents, prévu l'entêtement de ce dernier, suivie peut-être d'une volonté d'atteinte physique... N'était pas entrée dans le champ de ses possibles, cependant, l'intervention d'un adulte dans ce qui n'est guère pour lui qu'une discussion animée, comme elles le sont toujours avec Zachariah. C'est les yeux écarquillés qu'il sent le contrôle de la situation lui échapper, à lui qui fonde sur lui son bien-être tout entier... Ses yeux s'écarquillent tandis qu'il assiste à la violence verbale dont est victime son camarade, les mots cinglants, les mots cruels et menaçants... L'affolement au fond des yeux, il tente d'argumenter comme il le peut :
– Non non, monsieur, il n'a rien fait, c'était moi, enfin – je l'ai provoqué. Il n'y a rien à excuser, vraiment rien...
Mais rien ne semble pouvoir faire plier le maître, qui a agrippé Zachariah d'une main trop ferme – il y a une violence qui recourbe les doigts calleux autour du col du petit garçon, qui est insupportable à Hector ; il sent s'amasser tout au fond de lui une culpabilité âpre et visqueuse, qui lui monte jusque dans la gorge.

Ses yeux de petit être démuni, ce qu'il est sans le contrôle parfait qui assure la solidité de sa carapace, se mettent à larmoyer sans qu'il ne puisse rien y faire. Il fait une dernière tentative :
– S'il vous plaît, laissez-le ! Laissez-le ! Je suis désolé...
Ses plaintes restent sans réponse aucune, une fois de plus – et Hector se trouve impuissant face à une autorité qui le dépasse, à une violence qu'il ne sait pas combattre. Il baisse la tête tandis qu'il répète, litanique :
– Je suis désolé, désolé, désolé... pardon...
Le voilà inutile, et, pire encore, fautif – s'il n'avait pas adressé à la parole à Zachariah, les choses n'auraient pas évolué ainsi, et il n'aurait pas eu à subir les remontrances véhémentes du maître... Il ne voulait même pas lui parler, le petit Loganach, il le lui a clairement signifié dès les débuts de leur conversation – et pourtant il a insisté, Hector... Il voudrait se frapper, le petit poète, se mettre en pièces, s'infliger la violence qui aurait dû lui être infligée ; il voudrait se frapper, mais il se trouve au beau milieu de la cour, avec sur lui les regards de tous les enfants et le poids de toutes leurs attentes, alors il se placarde un petit sourire rassurant à la face avant d'aller s'adosser à un arbre et de sortir un carnet pour faire semblant d'y écrire afin d'échapper aux autres.



CODAGE PAR AMATIS
AVATARS PAR HEY BABINE ET PRETTY GIRL
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé


cthulhu fhtagn
Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond Empty

Revenir en haut Aller en bas
 

Souviens-toi de l'automne {Flashback} ft. Hector Desmond

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

 Sujets similaires

-
» Two blue hearts locked in our wrong minds ft. Hector Desmond
» hector — castle of glass.
» + Hector - L'antre du poète
» hector — be sure to wear some flowers in your hair
» You're not a drop in the ocean ft. Winnifred Carberry [flashback]

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
abyssus abyssum invocat :: selkirk :: slitrig-